VENDREDI 13 AVRIL 2012 à 20H ☞ « Ailleurs », de Lixin Bao + « Hinterland », de Marie Voignier
« Ailleurs »,
de Lixin Bao
France/Chine – 2010 – 12’36’’
Décembre 2005, la dernière locomotive à vapeur chinoise a pris sa retraite au dépôt Daban de la société de chemin de fer Jitong ( Mongolie-Intérieure, Chine). Le thème de ce documentaire est né des rencontres et d’expériences que j’ai vécues au contact des employés cheminots de Chine. Ils ont consacré leur vie aux chemins de fer. La locomotive, elle-même, est une métaphore du labeur de ces hommes. Au-delà d’un documentaire historique, je m’intéresse avant tout aux rapports humains.
Ce film fait vivre la mémoire de ces employés à travers des interviews nostalgiques. Il est rythmé par différentes temporalités. Mes propres souvenirs se mêlent aux leurs. Le souvenir peut-il être l’ailleurs du présent ?
Une production du Fresnoy-Studio national des arts contemporains.
Avec le soutien de JITONG Railway ( Group ) Company, LTD (Mongolie Intérieure, Chine)
Et le NMTV ( Télévision de Mongolie Intérieure, Chine )
« Hinterland »,
de Marie Voignier
France – 2009 – 49′
A 70km de Berlin, installé sur une ancienne base militaire un immense dôme métallique aux allures de vaisseau spatial abrite désormais un parc tropical saisissant. A travers la découverte de Tropical Islands et des multiples sédiments historiques sur lesquels il est implanté, le film propose une singulière mise en perspective d’un lieu avec son histoire, une archéologie poétique de notre rapport au temps, à l’espace et à l’illusion.
Scénario et image : Marie Voignier – Son : Ralf Küster – Production : Capricci Films en co-production avec le Centre d’Art de Brétigny
Dans cet Hinterland indiqué par le titre (littéralement l’arrière pays ; pour les géographes, aire économique lié à l’activité d’un port, périphérie révélatrice), Marie Voignier déplie les mouvements de l’Histoire : le directeur des lieux, les anciens du village comme des nouveaux, tel ce jeune venu tenter sa chance et les décors de cet univers sous cloche : huttes de pacotilles, ciels peints. Et plane sur tout cela, dessinée sur un ballon blanc qui va léviter discrètement le temps du film, la reproduction d’un dessin de 1920 de Paul Klee, intitulé Angelus Novus, appui à un texte de Benjamin, rédigé dans l’urgence en 1940, qui le décrit comme l’ange de l’Histoire le visage tourné vers le passé : « Il voudrait bien s’attarder, réveiller les morts et rassembler les vaincus. Mais du paradis souffle une tempête qui s’est prise dans ses ailes, si forte que l’ange ne peut plus les refermer. Cette tempête le pousse incessamment vers l’avenir auquel il tourne le dos, cependant que jusqu’au ciel devant lui s’accumulent les ruines. Cette tempête est ce que nous appelons le progrès.»
Placer cet ange de l’Histoire en plein décor, voilà le geste qu’opère Marie Voigner, et qui donne la mesure de son ambition, discrète et incisive, intuitive et articulée.
Nicolas Féodoroff pour le FID Marseille
Entretien
Extrait d’un entretien avec Marie Voignier au Festival international de cinéma de Marseille en 2009
A travers l’histoire de Tropical Islands vous évoquez aussi l’histoire de l’Allemagne de l’Est avant et après la chute du mur, quel était votre projet d’origine ?
C’est cet aspect qui m’a d’abord intéressé dans ce lieu. Sur quelques kilomètres carrés se trouvaient résumée une bonne partie de l’histoire est-allemande : la fin du troisième Reich, l’installation des Soviétiques, la vie en RDA, le départ des troupes bien après la chute du mur et enfin l’arrivée brutale du capitalisme. Ce territoire a traversé tous les contrastes historiques et les contradictions politiques des soixante dernières années. D’autres contradictions sont apparues aujourd’hui : on convoque l’« authenticité » tropicale, mais on expulse les immigrés ; on célèbre l’exotisme et la globalisation mais on ignore les actes xénophobes dans la région. Tropical Islands n’est pas seulement un énième parc de loisirs : il est symptomatique de la manière dont notre société tente de s’affranchir, cyniquement, des contraintes de l’espace et du temps.
Propos recueillis par Olivier Pierre
Les projections en entrée libre – dans la limite des places disponibles – se déroulent à Paris, dans le 2e arrondissement, près de la rue Montorgueil :
Salle Jean Dame, Centre sportif Jean Dame17 rue Léopold BellanMetro : Sentier (L3) ou Les Halles