JEUDI 26 OCTOBRE 2017 à 20 h ▶ Au hasard Balthazar, de Robert Bresson
Au hasard Balthazar
de Robert Bresson
France – 1966 – 1h 36′
Avec Anne Wiazemsky, François Lafarge
Vie et mort de l’âne Balthazar. Une parabole sur la quête de la grâce. L’âne Balthazar suit toutes les étapes de la vie humaine, des caresses de l’enfance au calvaire de la mort. Son destin croise et recroise le destin d’une jeune fille qui, comme lui, fait l’apprentissage de la douleur du monde.
« C’est un chef-d’oeuvre… Un film à la fois terrible sur le monde et le mal du monde et, en même temps, on ressent tout ça avec une espèce de douceur évangélique qui, pour moi, est extraordinaire. » Jean-Luc Godard
Au hasard Balthazar est un récit initiatique dont l’âne Balthazar est le héros, et la jeune fille Marie, interprétée par Anne Wiazemsky, son double. Sorte de récit picaresque ou chaplinesque (Bresson a d’ailleurs rapproché Balthazar du Charlot des premiers films de Chaplin) où est résumée l’entièreté d’une vie comme l’a énoncé son réalisateur, entre la caresse et la souffrance : naissance, baptême, enfance, tendresse et amour, âge mûr et labeur, conversion ou période mystique à la fin de la vie, mort. Et où le personnage principal est confronté, par des personnages et des situations, à un panoptique des vices (orgueil, convoitise, avarice, gourmandise,…). C’est un tableau en mouvement à travers une sorte de mal ontologique que nous peint Bresson dont l’âne est le point nodal. Il est de tous les plans réellement au premier plan, en gros plan, ou en arrière-plan, mais également paradoxalement par son absence, étant au centre de l’ellipse (dans son double sens géométrique et stylistique).
Cette chronique de l’âne, son omniprésence, dessine le portrait d’un être essentiellement anachronique : cet âne est « rétrograde et ridicule » comme l’énonce le père de Marie, et les jeunes garçons voyous disent encore ironiquement en voyant Balthazar « Chouette un âne, c’est rapide, c’est moderne ». Bresson choisit un petit pour (anti-)héros, un être ridicule, rétrograde, anti-moderne, lent, et pour toile de fond la campagne pyrénéenne, tous éléments qui contrastent avec une France en mutation dans les Trente Glorieuses, celle de la fin des paysans (c’est la thèse, contemporaine, d’Henri Mendras sur La Fin des paysans ; alors qu’ici, le père de Marie, ancien instituteur, devient agriculteur) et des signes de consommation, véritables fétiches modernes (mobylettes et vélomoteurs, radios, transistors, dont l’âne est présenté comme le contrepoint aussi bien comme moyen de transport que comme producteur de sons). Au hasard Balthazar est à ce titre aussi le document d’une époque prise à rebours.
C’est ainsi que le double de Balthazar, Marie, figure de jeune fille amante, peut se faire le relais en partie de la libération sexuelle des années 1960, marquées par l’accès à la contraception. La femme constitue un véritable agent de modernisation de la société, mais Bresson en fait comme Balthazar une figure faible qui subit le désir comme les violences des autres (ainsi, Gérard qui l’humiliera). Si elle délaisse un temps Jacques, son amour de jeunesse, c’est pourtant lui qui lui fait poser un acte ; tout en formulant que le mariage est quelque chose de périmé, elle lui octroie finalement son amour : « je l’aimerai, je l’aimerai ».
Analyse détaillée sur DVD Classik
Les projections en entrée libre – dans la limite des places disponibles – se déroulent à Paris, dans le 2e arrondissement, près de la rue Montorgueil :
Salle Jean Dame, Centre sportif Jean Dame17 rue Léopold BellanMetro : Sentier (L3) ou Les Halles