VENDREDI 12 OCTOBRE 2018 à 19 h 30 ▶ Cuba, rouges années, de Renaud Schaack
Cuba, rouges années
de Renaud Schaack
France – 2017 – Vostf – 83′
Entre 1963 et 1970, Cuba est l’une des capitales de la Révolution. Elle s’est fâchée avec Moscou. Elle appuie les guérillas latino-américaines. Elle essaie d’imaginer un socialisme autonome, ni soviétique, ni chinois, dont Che Guevara serait l’étendard. Une effervescence politique, sociale et culturelle s’empare alors de l’île. A l’aide d’archives inédites et du témoignage des protagonistes de cette épopée, Rouges années revisite une hérésie communiste qui s’éteindra avec la disparition de Che Guevara et le Printemps de Prague.
La projection est organisée en partenariat avec Les Amis du Monde diplomatique. Elle sera suivie d’un débat avec le réalisateur, Renaud Schaack, Paul Benalloul, des Amis du Monde diplomatique, et Loïc Ramirez, journaliste spécialiste de l’Amérique latine.
Critique ciné – Louis Danvers
Les avis sur Cuba et sa révolution manquent si souvent de nuances qu’on en est presque toujours réduit à voir s’opposer thuriféraires inconditionnels et critiques impitoyables. Comme si la réalité ne pouvait qu’être une et univoque, comme s’il n’y avait aucune marge entre le paradis communiste et l’enfer totalitaire… Renaud Schaack fait donc oeuvre utile avec Cuba, rouges années, un documentaire tentant de faire la part des choses et battant en brèche quelques idées reçues. Notamment et surtout quand il vient rappeler qu’avant de s’inscrire puis de retourner dans l’orbite soviétique, avant aussi de se raidir idéologiquement et de réprimer à tout-va, le régime issu du renversement du tyran Batista a tenté de tracer une voie originale, alimentant une utopie socialiste insoumise aux grands blocs et à l’affrontement Est-Ouest. Le film replonge dans ces années 1963- 1970 où, fâchée avec Moscou, La Havane porta la flamme révolutionnaire sur le continent latino-américain et même au-delà. Tout en voyant une grande effervescence politique mais aussi culturelle s’emparer de ses rues. Il ne masque pas pour autant les dérives qui figèrent ce mouvement, des purges aux censures et à la limitation des libertés en matière d’expression mais aussi de sexualité. Entre la montée des espoirs de changement, les acquis indéniables puis les errances (économiques, surtout, mais aussi politiques), Cuba, rouges années ne manque pas d’interroger aussi le présent. Ce n’est pas le moindre intérêt de ce documentaire propre à faire débat.
Depuis près de 60 ans et surtout durant la dernière décennie, qui semble avoir vu triompher l’idéologie néo-libérale et le dénigrement généralisé des expériences socialistes, Cuba semble être l’objet de deux opinions irréconciliables : d’un côté celle qui ne voit en Cuba qu’un des derniers reliquats des régimes totalitaires communistes entre répression aveugle et misère économique, oubliant totalement ce que fut auparavant la terrible dictature corrompue de Battista ; de l’autre celle qui s’attache désespérément à l’expérience cubaine des origines qui fut, au début des années 60, porteuse d’un énorme espoir social et historique pour tous les peuples du monde qui voulaient se libérer du joug de l’impérialisme américain et de ses vassaux. Et bien voilà un film formidablement documenté, confrontant l’histoire et le présent, qui pourrait réconcilier les plus ouverts des deux camps, tant il résume bien toute la complexité parfois schizophrène du sujet.
Entre 1963 et 1970, Cuba est l’une des capitales de la Révolution. Prenant ses distances de Moscou, elle soutient les guerillas latino-américaines et tente d’imaginer un socialisme autonome, ni soviétique, ni chinois, dont Che Guevara serait l’étendard. Une effervescence politique, sociale et culturelle s’empare alors de l’île. A l’aide d’archives inédites et du témoignage des protagonistes de cette épopée, Cuba, Rouges années revisite une hérésie communiste qui s’éteindra avec la disparition de Che Guevara et le Printemps de Prague.
Rares sont les films sur l’histoire de Cuba qui ne se focalisent pas sur les protagonistes de la révolution communiste. Celui de Renaud Schaack a cette qualité. En soixante-treize minutes, à l’aide d’archives inédites et de témoignages nombreux, il aborde en profondeur la double question : quelles transformations a connues Cuba dans les années 1960 et quelles en ont été les conséquences ? Le documentaire se resserre précisément sur la période 1963-1970, qu’il reconstitue de façon chronologique et par chapitres. Intellectuels, universitaires et artistes ayant vécu ces « rouges années » témoignent de l’effervescence qui s’empara de l’île. Formulant une critique lucide, au-delà des icônes révolutionnaires et des illusions perdues, ils expliquent clairement pourquoi l’utopie cubaine, cette « hérésie communiste », n’a pas marché.
Rien n’est occulté des discriminations, de la propagande révolutionnaire ou de la réalité du régime autoritaire. Sur le plan formel, le film intercale entre les interviews de beaux portraits de Cubains de tous âges, ménageant ainsi des respirations qui permettent de digérer la profusion d’informations.
Cela fait maintenant vingt ans que le réalisateur, diplômé de l’Institut Européen du Cinéma de Nancy, est tombé sous le charme de Cuba. Arrivé un peu par hasard, il s’est laissé séduire par l’âme et l’histoire de cette île. A travers ses nombreux films, tels que Cuba : une utopie blessée (2006) ou Haydée et Célia : quand la Révolution s’est faite femme (2011), c’est cet amour de Cuba et de son peuple que Renaud Schaack essaie de nous transmettre.
Les projections en entrée libre – dans la limite des places disponibles – se déroulent à Paris, dans le 2e arrondissement, près de la rue Montorgueil :
Salle Jean Dame, Centre sportif Jean Dame17 rue Léopold BellanMetro : Sentier (L3) ou Les Halles