JEUDI 28 MAI 2009 à 20H ☞ « LE MYSTERE PICASSO », de Henri-Georges Clouzot avec Pablo Picasso
« LE MYSTERE PICASSO »,
de Henri-Georges Clouzot avec Pablo Picasso
Prix du Jury, Cannes 1956. Documentaire – France – 1956 – 78′
Ce film est une oeuvre unique et reste à ce jour la seule tentative de rendre compte cinématographiquement du processus de création. Sous la direction de Henri-Georges Clouzot et grâce à un procédé ingénieux de verre transparent et d’encre spéciale, Picasso compose plusieurs oeuvres sous nos yeux, au gré de son inspiration.
Sur la toile blanche de l’écran, le crayon de Picasso court avec fermeté et souplesse et un dessin s’élabore devant le spectateur, dans un silence recueilli où seul s’entend le crissement du fusain. Dès le deuxième tableau qui sera suivi d’une dizaine d’autres, une musique abondante et riche, aux rythmes les plus variés, accompagne ce mystérieux cheminement de la création artistique où Picasso – qu’on l’apprécie ou qu’on ne le comprenne pas – se montre virtuose. Et devant chaque nouvelle toile blanche s’opère cette création magique, partie d’un simple trait noir, dans l’angle ou le centre de ce vide lumineux, transformé et modifié par des bourgeonnements incessants, auxquels la symphonie des couleurs aux rapprochements audacieux confère richesse dans la simplicité ou au contraire harmonie, dans l’abondance des tons. Aux dessins surréalistes si surprenants qu’ils relèvent de la jonglerie, succèdent des tauromachies – rares sujets où Picasso oublie son goût de la mystification pour rester fidèle à l’esprit initial du premier trait de crayon : ses scènes de corrida où le taureau vainc toujours l’homme sont les plus saisissantes et accessibles au public le moins initié. Mais Picasso affectionne ces mutations extravagantes de quelques fleurs en un poisson joufflu, puis un coq altier enfin en une tête de diable d’un burlesque inquiétant. Et le spectateur impuissant et consterné par ces transformations successives qui lui semblent massacrer une toile dont l’état antérieur paraissait préférable, doit subir vingt, trente modifications successives que la caméra lui assène à un rythme diabolique. La dernière fusée de ce feu d’artifice est la plage de la Garoupe, présentée en cinémascope, avec les transformations incessantes qu’apporte Picasso à cette grande fresque, à partir de l’édifice primitif aux tendres couleurs jusqu’au tableau noir et tourmenté.
Cinémathèque française
Capter sur le vif l’inspiration même et les combats qu’elle mène contre ses propres démons, voilà ce que l’ambitieux Clouzot avait décidé de tenter. Grâce à des encres qui traversent magiquement le papier, il devenait possible de filmer la genèse totale d’un tableau, les hésitations et les repentirs de l’auteur, ses échecs, ses victoires. La caméra, vissée au sol derrière la feuille blanche, enregistrait la naissance des lignes… sans qu’apparut jamais la main qui les traçait, la main de ce génie farfelu, indomptable, rieur, bouleversant et toujours inattendu: Picasso le sorcier. ( … ) On pense bien que la rencontre des deux hommes a les couleurs et la violence de l’orage. Le film qu’elle a créé est toujours un document, mais jamais un documentaire. C’est une prodigieuse affaire policière où le détective, l’assassin et la victime se confondent. Devant Picasso foudroyé, Clouzot lance Picasso aux mille ruses à la poursuite de Picasso l’impitoyable. Il y a du Corbeau et du Quai des Orfèvres dans cette course silencieuse, pleine d’impatience et de colère. Course qui traversera tout le film, et donnera à tous les moyens techniques employés une extraordinaire unité passionnelle.
– Claude Brulé, Paris-Presse, 20 mai 1956
Retrouvez des photogrammes du film sur : http://www.cineclubdecaen.com/realisat/clouzot/mysterepicasso.htm
Les projections en entrée libre – dans la limite des places disponibles – se déroulent à Paris, dans le 2e arrondissement, près de la rue Montorgueil :
Salle Jean Dame, Centre sportif Jean Dame17 rue Léopold BellanMetro : Sentier (L3) ou Les Halles